vendredi 19 octobre 2012

Vers le plus gros scandale de dopage dans le sport de haut niveau ?


Jusqu'à présent, nous nous étions bien gardés de parler du cyclisme professionnel et de compétition, de ses facéties et de son fardeau d'affaires, d'une part parce que d'autres le font déjà très bien, et d'autre part parce que c'est un choix que l'on a fait pour donner une orientation différente à notre vue sur ce que représente désormais le cyclisme à nos yeux. Nous avons choisi délibérément de nous éloigner du système du cyclisme de compétition actuel pour tout un tas de raisons. Nous gardons malgré tout sur lui un oeil intéressé, aiguisé et resserré, mais avec un regard inquiet...

Le vélo reste et restera pour nous une grande passion, quoi qu'il advienne. Cependant, et nous ne sommes pas les seuls, nous avons le sentiment qu'avec "l'affaire" du moment, ce qu'on appelle le cyclisme moderne, est semble t-il à un tournant de son histoire. C'est pour cette raison que nous nous permettons de nous exprimer et d'intervenir car avec le cyclisme de haut niveau, c'est tout le Vélo dans son ensemble qui risque d'être impacté avec deux options possibles qui peuvent ne dépendre que de la parole d'un seul homme : le cyclisme et ses instances explosent, tout est remis à plat afin de repartir sur des bases saines, ou seulement une partie du cyclisme est touchée, les instances s'en sortent sans trop de dommages et sauvent l'essentiel, tout continu comme avant ! En gros, n'ayant plus rien à perdre, Armstrong parle et déballe tout, après que l'UCI l'ait laché, cette instance dirigeante explose elle-même, tout serait remis à plat et le cyclisme pourrait rebondir et repartir, ou, Armstrong parle, mais en voulant préserver l'essentiel ainsi que l'UCI si celle-ci continue de le soutenir, quasiment rien ne change et tout repart comme avant.
Ces derniers temps donc, suite à la parution du rapport de l'USADA (agence anti-dopage américaine), l'affaire Armstrong a commencé à agiter la sphère médiatique et risque de faire grand bruit dans le milieu du cyclisme, mais pas seulement : c'est un potentiel séisme qui s'annonce, méli-mélo entre sport, politique, intérêts commerciaux et personnels... Beaucoup de gens seraient mouillés, sportifs, médecins, instances dirigeantes, politiques,  sponsors... Acteurs, complices, corrompus... Le plus gros scandale du sport de haut niveau est peut-être en train de naître sous nos yeux.
Comme nous l'évoquons plus haut, d'autres personnes analysent et parlent de tout ça avec bien plus de pertinence et de talent que nous pourrions le faire nous-même. Pour mieux comprendre l'histoire, nous avons choisi deux articles qui résument très bien, d'abord, qui était vraiment le personnage Armstrong, avec l'interview de l'ancien coureur professionnel Christophe Basson dans Le Nouvel Observateur, puis, l'article de Laurent Martel, talentueux et très pertinent rédacteur/administrateur du site La Flamme rouge qui suit et analyse entre autres les affaires de dopage dans le cyclisme depuis bien longtemps, trop longtemps. N'hésitez pas à faire un petit tour sur son site afin de pouvoir cliquer sur les liens qui figurent dans son article mais aussi pour aller lire les commentaires non moins intéressants de ce même article. Vous avez déjà entendu et vous n'avez pas fini d'entendre encore parler de cette sombre affaire. Mais à ce jour, en dehors du bla-bla et du battage médiatique habituel, si vous souhaitez lire le vrai, ces deux articles suffisent et expriment à eux seuls ce qui nous semble être le plus explicite pour comprendre le début de cette histoire.



1er article : (cliquable ou voir ci-dessous)


Armstrong lâché par ses sponsors : dans le cyclisme, on savait tous qu'il se dopait



Ex coureur cycliste





LE PLUS. Le rapport d'enquête de l'agence américaine antidopage, rendu public le 10 octobre, met en lumière le système mis en place par Lance Armstrong pour gagner ses sept tours de France. Résultat : ses sponsors le lâchent, comme s'ils découvraient l'affaire. Pourtant, Christophe Bassons, coureur ostracisé par le peloton en 1999 pour son refus du dopage, estime que le monde du cyclisme ne pouvait pas ne pas savoir.
Édité et parrainé par Sébastien Billard

Lance Armstrong lors de sa victoire sur la 17e étape du Tour de France 2004 au Grand Bornand, le 22 juillet (P.DEJONG/SIPA).


CYCLISME. Lance Armstrong a élaboré le "programme de dopage le plus perfectionné et le plus efficace" de l'histoire du sport. Telle est donc la conclusion du rapport d'enquête de l'Usada, l'agence américaine antidopage. Est-ce une véritable surprise ? Non, bien sûr.

Pour les personnes qui, comme moi, faisaient partie du peloton au moment de l'arrivée de l'US Postal sur le Tour de France 99 – coureurs, directeurs sportifs, institutions, médias –, les pratiques dopantes du coureur américain et de ses coéquipiers n'étaient pas un mystère.

Il maîtrisait les actions et les mentalités du peloton

Bien entendu, nous n'avions pas de preuves formelles. Mais, physiologiquement, les performances des coureurs de cette équipe étaient alors ahurissantes. Elles ne pouvaient pas être expliquées "naturellement". Lorsqu'un sportif récupère plus vite après le quinzième jour de course qu'après le premier, il y a un problème. Il y avait un problème et tout le monde le savait.

Ces suspicions fortes, on en discutait entre coureurs, mais beaucoup, et je le comprends, ont fait le choix de se taire. Pourquoi ? En raison des enjeux, tout simplement. Le rapport d'enquête de l'Usada le montre bien, l'US Postal exerçait sur le peloton une pression énorme.

Cette équipe bénéficiait d'abord de liens politiques avec certaines institutions qui avaient sans doute intérêt à la protéger. Mais surtout, l'US Postal, du fait des performances hors norme de ses coureurs, avait tout pouvoir sur la course. Elle pouvait décider de tout : le vainqueur d'une étape par exemple, en laissant ou non des coureurs s'échapper. Lance Armstrong maîtrisait les actions et les mentalités du peloton.

Des pressions permanentes

L'US Postal pouvait aussi faire perdre quelqu'un. J'ai publiquement mis en cause le niveau de performance de Lance Armstrong après la première étape de montage du Tour 99, et j'en ai payé le prix.

Au lendemain de mes déclarations, dès le début de l'étape, personne au sein du peloton ne m'a adressé la parole. J'ai tenté une échappée. De nombreuses équipes, dont la mienne, se sont lancées à ma poursuite. Je fus repris, Armstrong s'est alors approché de moi pour me dire, avec un regard froid, que je faisais du mal au cyclisme et que je n'avais rien à faire ici. Seul face à l'omerta, j'abandonnais le Tour quelques jours plus tard.

Le rapport de l'Usada met toutefois en lumière un pan du système que l'on ne soupçonnait pas : les menaces qui ont été exercées sur les coéquipiers d'Armstrong pour qu'ils adhèrent à ce système de dopage.

Là où dans le système Festina, les coureurs étaient fortement incités à se doper, au sein de l'US Postal, le système était encore plus brutal. Le choix n'existait pas. Je ne peux pas m'empêcher aujourd'hui de voir en Tyler Hamilton, Floyd Landis et George Hincapie des victimes supplémentaires de Lance Armstrong.

Je ne peux pas m'empêcher non plus, aujourd'hui, de déplorer le temps qui a été perdu par le cyclisme depuis ces années noires. Ce système a mis un tas de personnes en difficulté et je n'ai pas l'impression que les mentalités aient véritablement évolué sur la question du dopage.

Les mentalités n'ont pas changé

Les médecins occupent toujours une place importante au sein des staffs. Une place injustifiée. Que font-ils ici ? Je m'interroge. En compétition, les coureurs ont à leur disposition le médecin de la course. Lors des semaines d'entrainements, ils ont leur médecin de famille. Alors, à quoi bon un médecin au sein de chaque équipe ? Depuis leur arrivée dans le peloton, les médecins ont conduit à une véritable banalisation de l'usage de médicaments, soit-disant pour soigner et améliorer la récupération des coureurs...

La multiplication des contrôles a, sans doute, eu pour effet mécanique de diminuer les pratiques dopantes. Mais quand je vois certaines performances actuelles, je doute toutefois qu'elles aient complètement disparu. Oui, les années Armstrong sont terminées. Mais il n'est pas normal que des coureurs suspendus pour dopage reviennent aussi facilement dans le peloton, un ou deux ans après, comme c'est souvent le cas. J'ai le sentiment que la triche continue d'être acceptée. Tout du moins, elle n'est pas encore suffisamment dévalorisée ni découragée.

Je reste persuadé qu’il faut repenser la prévention du dopage et notamment la prévention des conduites dopantes. De nos jours, quand tu es sportif de haut niveau, tu n’existes aux yeux de la majorité des gens que si tu es performant, qu’importent ta mentalité, tes valeurs humaines ou ta volonté. Il est inquiétant de constater que ces sportifs n’existent, voire ne s’acceptent, que par le regard que leur portent les autres. L’estime de soi autonome doit être développée. Ce n’est que lorsque qu’on se respecte qu’on est capable de respecter les autres !


Propos recueillis par Sébastien Billard

Source : Le Nouvel Observateur



2ème article(cliquable ou voir ci-dessous)



Lance Armstrong ne doit pas tomber seul

La descente aux enfers de Lance Armstrong est bien amorcée. Comme prévu, le rapport de l’USADA a précipité les choses et Armstrong avait très certainement raison de vouloir éviter sa publication.
Au cours des 24 dernières heures, de nombreux sponsors importants et de longue date de Lance Armstrong ont annoncé qu’ils mettent fin à leur partenariat: Nike, Trek, Radio Shack, Anheuser-Busch (un brasseur belge, propriétaire de la bière Budweiser), Honey Stinger et FRS (produits énergétiques). La compagnie Oakley, présente aux côtés d’Armstrong depuis le début de sa carrière, attend pour sa part l’avis de l’UCI (attendu d’ici la fin du mois) pour se prononcer.
Lance Armstrong a aussi annoncé qu’il quittait son poste de président de sa fondation LiveStrong. Sa déclaration évoque son souci de ne pas associer sa fondation avec ses déboires reliés à sa carrière cycliste.
Enfin, Lance Armstrong ne “twitte” plus depuis 48h, lui qui, en temps normal, publie de nombreux “twits” chaque jour. La preuve que l’homme vit des moments très difficiles.
Je suis convaincu que plus que jamais, Lance Armstrong évalue les avantages et inconvénients d’un passage aux aveux. Je l’ai écrit, il vient un moment où nier seul, en dépit de la cohérence des autres aveux, tourne au ridicule. La situation de Lance Armstrong tourne actuellement au ridicule et l’homme est de plus en plus isolé, lâché de tous. Très bientôt, il réalisera peut-être qu’il n’a lui-aussi plus rien à perdre, surtout que ses amis du côté de l’UCI le lâcheront très probablement d’ici la fin du mois, confirmant la perte de tous ses titres sportifs.
Et rappelons que de nombreuses sociétés n’attendent que le verdict de l’UCIpour le poursuivre financièrement, notamment la FFC et ASO pour récupérer les primes de victoires du Tour et la compagnie d’assurance SCA qui lui a versé des millions de dollars prévus en cas de victoire à répétition sur le Tour. Lance Armstrong risque donc de perdre de nombreux millions de dollars au cours des prochains mois, ce qui s’ajoutera aux nombreux autres qu’il a probablement déjà perdu en frais d’avocats de toute sorte.
Nous faisons donc bel et bien face au plus important scandale de dopage de l’histoire du sport.
Mais Lance Armstrong ne doit pas tomber seul.
Si je n’ai jamais adhéré à l’argument fallacieux d’une “chasse aux sorcières” évoqué jusqu’ici par les avocats d’Armstrong, il serait scandaleux qu’il soit le seul à tomber au cours des prochains jours. Si tel était le cas, nous serions tous perdants et il serait légitime d‘être frustrés qu’une seule personne ait morflé.
Plus encore, ce ne serait pas juste à l’endroit de Lance Armstrong.
J’estime que Johan Bruyneel doit tomber, que Michele Ferrari, dont les propos sont insupportables et méprisants, doit tomber, que des têtes doivent aussi tomber dans le personnel actuel des équipes World Tour et surtout, à l’UCI. Et que la lumière doit être faite sur le rôle de la compagnie Nike dans la couverture de contrôles positifs de Lance Armstrong par l’UCILes propos, confiés sous serment, de Kathy LeMond sont troublants à cet égard.
Le plus difficile sera de faire tomber des têtes du côté de l’UCI. À qui cet organisme rend-t-il en effet des comptes? Devant qui, outre son comité directeur et son congrès, Pat McQuaid est-il redevable? Qui peut l’inviter à démissionner, outre les membres du congrès? Rappelons que les membres du congrès de l’UCI sont des personnes, au maximum trois, nommées par les fédérations dont l’affiliation est à jour.
Bref, les prochains jours seront intéressants.
Il est à souhaiter que Lance Armstrong deviendra raisonnable et passera aux aveux rapidement. Il pourra évoquer comme circonstances atténuantes une époque trouble du cyclisme, où une majorité de coureurs se dopaient. Comment lui reprocher alors d’avoir fait comme tous les autres?
Les circonstances seront vraiment atténuantes à son égard s’il fait la lumière sur ses relations avec l’UCI, avec Michele Ferrari et Johan Bruyneel. C’est la dernière pièce manquante du puzzle pour que le vrai grand ménage dans le cyclisme se fasse enfin. Car ca va prendre plus qu’une petite signature au bas d’un papier… Cela passe par une profonde remise en cause des rôles et responsabilités actuels de l’UCI, notamment à l‘égard de la lutte contre le dopage. Il m’est insupportable de savoir que M. Ferrari “entraine” encore des coureurs pro en activité, dont certains sont tous jeunes.
Lance Armstrong fait donc face une nouvelle fois à l’histoire: s’il continue de nier, c’est un suicide public. S’il passe aux aveux, il a une chance de réhabiliter sa réputation et surtout, de nous prouver tout son amour pour le sport cycliste qui ne peut manifestement pas continuer sur la voie actuelle. En ce sens, Lance Armstrong a aujourd’hui de nouveau l’opportunité d‘être un moteur du changement vers un monde meilleur, au bénéfice des générations futures… et donc de ses propres enfants.
Source : La Flamme Rouge




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